Retour à la Baratte, terre de culture(s)

par Claire-Hélène Delouvée, paysagiste D.P.L.G.

(Avril 2007)

 

Au long des vieilles rues de la Baratte, rue du Craquelin, rue Saint-Fiacre ou impasse Saint-Fiacre, défilent les murs de pierre et de torchis. Murs courbes, épousant la forme des parcelles vivrières, murs chauds, retenant le soleil pour les espaliers, les vignes et les légumes frileux.
Les maisons des maraîchers se serrent sur le bord de l'îlot de la Baratte, à l'Est de la plaine fertile. Terre sablonneuse et riche, vestige de la valorisation humaine de la plaine limoneuse de la Loire.

Départageant les sillons, rigoles et sentes irriguant les jardins selon des mailles irrégulières, formant pour le promeneur un réseau labyrinthique aux horizons connus, cependant.
En effet, la Baratte est double : elle relie l'ancien faubourg maraîcher à une urbanisation récente, sur remblai.
Du côté des Courlis, le long des "jeunes" lotissements, un ourlet enfriché de parcelles en déprise offre, au printemps, le nuage blanc des floraisons des prunelliers, arbustes pionniers. Une vaste chaussée sépare cette végétation débordante et épineuse des pavillons sagement alignés et conduit à des prairies humides plantées de vieux tétards d'osiers.

Tandis qu'au centre des cultures, l'eau est canalisée au moyen de fossés; côté pâture, l'eau imbibe sans retenue le sol herbeux. Nous sommes bien ici dans un ancien marais, organisé depuis quelques siècles par les occupants de la Baratte...

Depuis cette plaine, le côteau de la Nièvre et son quartier "bourgeois" se déploie, tandis qu'au Sud, la digue de l'autoroute referme cet espace unique et original.

Les traces de l'autosuffisance datant de temps pas si lointains se juxtaposent aux installations maraîchères modernes. Ainsi, cordons de vignes et arbres émondés, puits et murs constituent les ancêtres toujours actifs des tunnels de forçage. Les lignes de plastique blanc, parallèles aux lignes bien noires des labours soyeux, évoquent la répétition des gestes fertilisants.

Ce lieu délimité, organisé, travaillé, qui pourrait devenir un lieu de balade, de jardinage et même d'expérimentation pour les Neversois et leurs voisins, au même titre que les jardins des marais de Bourges, est pourtant ignoré par beaucoup. Réserve foncière aux qualités agronomiques sans pareil, la Baratte s'abandonne.
Allez, il est temps d'y revenir, d'en recoudre les fils de trame et d'offrir ce grand jardin à l'appétit renaissant des citoyens !